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27/12/2015

En marche avec le pape François (3) : la Sainte Famille

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Une fête dont il faut comprendre le sens :


 

 

La Sainte Famille est « inimitable », soulignent les théologiens. Mais la prière finale de la messe de ce dimanche demande au Père d'accorder « à nos familles la grâce d'imiter la famille de ton Fils »...

Comment expliquer cette contradiction apparente ?

Par le fait qu'elle n'existe pas : il faut simplement distinguer les domaines. Si nous ne pouvons « imiter » la Sainte Famille que par « grâce », c'est qu'il s'agit de surnaturel. Nous ne prétendons pas imiter la structure ni la vie quotidienne de la Sainte Famille : vie dont l'Evangile ne nous dit rien du tout... Si l'on songe à l'abîme de différence qui sépare la famille occidentale moderne (deux individus adultes + quelques enfants) de la famille orientale d'il y a deux mille ans, on comprend quelle balourdise serait de prendre la famille de Jésus pour notre « modèle » sociologique.

Ce que nous devons imiter, c'est la vocation surnaturelle de la famille de Jésus. Comme l'expliquait ce matin le P. Jean-Paul, curé de ma paroisse, le Fils éternel s'incarnant dans la nature humaine naît forcément dans une famille : mais ce qui compte n'est pas elle, c'est Lui. Et Marie et Joseph sont là pour L'offrir au monde : vocation qu'ils ne comprendront que progressivement, comme le montre l'épisode du Temple dans l'évangile de ce dimanche...

Méditons le fait que l'Eglise, pour célébrer la Sainte Famille, nous donne précisément un texte (Luc 2, 41-52) où l'enfant échappe à ses parents, et où ceux-ci tâtonnent pour comprendre : « Pourquoi nous as-tu fait cela ? Nous avons souffert en te cherchant ! »... Ils ne le cherchaient pas là où ils l'auraient dû. Pas plus que dans l'épisode ultérieur (Luc 8, 21, Matthieu 12, 50) où Jésus devra déclarer : « ma mère et mes frères, ce sont ceux qui écoutent la parole de Dieu et la mettent en pratique... »

La famille aujourd'hui a sa place dans la vision apostolique de l'Eglise : il suffit pour s'en rendre compte de consulter le Catéchisme catholique et l'enseignement de tous les papes.

Mais précisément, cette vision est apostolique : et c'est ce que Jésus fait comprendre dans les trois textes cités !

L'évangile de ce matin n'est pas une charade de civilité bourgeoise à l'usage de la « France bien élevée ». Au contraire, c'est une leçon révolutionnaire : l'Incarnation est une révolution surnaturelle au coeur du naturel. Chaque chrétien a pour mission à travers ses actes d'offrir Jésus aux autres, comme le fit Marie ; et cela, qu'il soit ou non chargé de famille !

C'est ce que voulait dire le pape François dans l'avion où il expliquait ces choses aux journalistes, et où il eut – tout en défendant la conception traditionnelle de la famille – une petite phrase ironique, mais parfaitement orthodoxe, sur la déviance « lapiniste » qui transforme l'accueil de la vie en idolâtrie de la chair et du sang. La foi chrétienne est incompatible avec un culte tribal, ceci doit être rappelé à chaque époque... Certains se sont d'ailleurs gourmés contre la petite ironie du pape ; ils auraient mieux de relire sa catéchèse familiale.

Le chant de sortie de la messe de ce matin résumait tout cela :

« La première en chemin, Marie tu nous entraînes / A risquer notre oui aux imprévus de Dieu / Et voici qu'est semé en l'argile incertaine / De notre humanité, Jésus-Christ Fils de Dieu...

« La Parole a surgi, tu es sa résonance / Et tu franchis des monts pour en porter la voix...

« marche avec nous Marie, aux chemins de l'annonce ! »

 

Commentaires

PAGANISME

> En effet il y a une tentation moderne d'idolâtrie de la famille pour elle-même. Comme si "la famille" était plus importante que la foi. Comme si la religion catholique était "au service de la famille". Paganisme.
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Écrit par : vianney / | 27/12/2015

L'HUMBLE QUOTIDIEN

> Il y a un côté par lequel non seulement la Sainte Famille est imitable, mais de fait l'est de beaucoup de familles qui l'ignorent, voire qui ignorent qu'elles sont mêmes familles, c'est celui de l'humble quotidien.
Qu'est-ce qu'une famille? C'est tellement simple en effet que beaucoup d'entre-nous Occidentaux, qui la cherchons dans un idéal hors du monde, en lutte héroïque contre tous les démons, sommes aveugles à sa présence aujourd'hui.
Oui, derrière le rideau occultant des approches sociologiques, les oeillères juridico-catholiques, les stéréotypes des séries américaines (où le père doit sauver le monde pour reconquérir une princesse d' épouse et éblouir des enfants géniaux) elle continue, chez nous sous la cendre de ses glorieuses façades haussmaniennes, de réchauffer les coeurs et les corps.
Une famille je crois c'est d'abord un foyer où l'on vient se réchauffer, en y mangeant ensemble, en y dormant à la même chaleur. Et comme un foyer doit être entretenu, chacun selon sa mesure vient y mettre son fagot, selon son souffle y attiser la flamme bienfaisante. Autrement dit on y vit ce prendre-soin-les-uns-des-autres qui fonde la communauté humaine.
C'est aussi simple que cela: entretenir le feu où chauffe le repas commun, auprès duquel on se repose, les uns protégeant les autres.
Là où il y a de la chaleur partagée, il y a une famille, quand bien-même aucun autre signe extérieur n'est présent.
Il y a dans nos rues des couples de SDF qui sont des icônes de la Sainte Famille. Parce qu'ils veillent l'un sur l'autre, partagent leur pitance comme leur couverture.
Là où il n'y a pas de chaleur il n'y a pas de famille, quand bien-même il y a tous les autres signes extérieurs: mariage, enfants, traditions arborées, héritages choyés, et la photo de famille sur la cheminé.
La Sainte Famille de Nazareth, par l'extrême simplicité de son quotidien, est à la portée de tout le monde: oui chacun, aussi pauvre, éclopé, abîmé,(même dans sa sexualité), soit-il, peut se vivre membre à part entière d'une telle famille. Bon je vous laisse, ou on mangera du poulet caramélisé :-)
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Écrit par : Anne Josnin / | 27/12/2015

Pour Anne,

> un texte qui a plusieurs années mais que j'aime beaucoup:
"La famille ce n’est pas d’abord un sujet de conversation ou de philosophie, ni même un thème de colloque ou de manifestation. C’est encore moins ces images d’Épinal où l’on sort du monospace le dimanche pour afficher, tête peignée et missel en main, son «tout va bien ». La famille est passionnelle, charnelle et animale ! Ça commence dans l’envie, le désir et les corps mêlés, puis dans le sang, dans les fragrances de couches et de lait caillé, de dents qui ne sortent pas, de regards fatigués et de petits matins zombies. La famille, c’est l’horreur sanitaire, celle des tracas quotidiens, des gastros à la chaine, des « Maman, j’ai vomi ». C’est la valse des thermomètres, des toubibs, des urgences, pour un bras, une jambe ou plus grave. C’est l’horreur des grandes angoisses, ici un ado à l’hosto, là, une mère au scanner. La famille, c’est l’horreur concentrationnaire où s’entasse une fratrie qui n’en finit pas de se disputer, de hurler, de s’exaspérer, de s’agresser, de se dénoncer, de se voler, en fonction des âges et des intérêts : jouets, crayons, vêtements, CD, ordis, amis. C’est l’horreur dictatoriale de parents kapos caractériels exténués qui « gueulent » pour une chambre à ranger, un couvert à mettre ou une année à réussir, sur des mômes dont on se demande s’ils tiennent du bovin ou de l’invertébré, ou des deux. La famille, c’est l’horreur d’une salle de vie, d’un hôpital d’autistes où personne ne se comprend, où les mondes de chacun : enfance, adolescence, adulte, homme, femme, fille, garçon, ne se rencontrent pas. La famille, c’est de l’humain blessé qui s’entasse, des expulsés de paradis terrestre qui vivent en bande. La famille, c’est un gang de pêcheurs récidivistes sauvés, qui n’a rien trouvé de mieux à faire que de s’aimer."

Tiré d’une chronique de 'L’Homme Nouveau' de sept. 2007
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Écrit par : MAT / | 27/12/2015

@ Anne Josnin

> C’est bon le poulet caramélisé ! Vous ajoutez un peu de miel, vous mélangez et vous couvrez, après avoir coupé le feu… C’est comme en famille : une touche de miel est parfois nécessaire pour prendre-soin-les-uns-des-autres, comme vous dites. A condition de ne pas virer bec sucré…
Puissent nos (saintes) familles conjuguer le mieux possible amour et vérité !
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Écrit par : Denis / | 27/12/2015

TROIS JOURS

> Un verset est à méditer (je vous rassure, ça a été amplement fait par l'exégèse et la théologie chrétienne depuis deux millénaires) "C'est au bout de trois jours qu'ils le trouvèrent [...]". Oui, trois jours comme...
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Écrit par : Aventin / | 27/12/2015

A L'OPPOSÉ DU COCON FUSIONNEL

> Merci à tous pour ces réflexions intéressantes sur la Sainte Famille.
Ça m'en fait venir d'autres qui me permettent de préciser ce qui me touche dans ces récits.
La Sainte Famille est à l'opposé du cocon fusionnel des productions hollywoodiennes, comme aussi des constructions très programmées des familles laïques françaises avec ces enfants "voulus" auxquels les parents sont fiers de donner "toutes leurs chances".
Dès le début, Marie et joseph rejettent tout instinct de possession ou de domination. Jamais ils n'auraient l'idée de dire qu'ils ont "fait" leur fils, qu'il existe "parce qu'ils l'ont voulu". Il est merveilleux de les voir abdiquer de la fierté d'être les parents du Messie. On sait seulement qu'ils souffrent de l'inquiétude de l'avoir perdu. Leur rôle de parents a cependant une grande importance, sans doute grâce à son humilité même, puisque Jésus les suit à Nazareth au lieu de rester dans le Temple, comme jadis Samuel...
C'est que Jésus n'est pas consacré à Dieu mais qu'Il EST Dieu : Il est proche des hommes et attentif à leurs prières. Ici et aux noces de Cana on Le voit exaucer les prières de ses parents.
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Écrit par : Guadet / | 27/12/2015

ADOPTION ?

> Comme c'est aujourd'hui la fête des Saints Innocents : que faut-il penser de cette initiative, dont j'ai appris l'existence sur le site de la Fraternité Marie Reine de la Paix ? Une "'adoption" dans ce cadre est-elle théologiquement juste ?
http://adoptonslesenfantsavortes.fr
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Écrit par : Feld / | 28/12/2015

à Anne et Mat:

> Merci pour vos réflexions et vos textes. Avec ce que je vis en ce moment, j'encaisse mal les réflexions et les sermons sur le modèle de la Sainte Famille (Pardonnez-moi Jésus, Marie, Joseph) ou simplement sur le modèle de la famille catho.
Oui, la famille est une réalité charnelle composée d'individus pécheurs. Je ne supporte plus ce discours sur "La Famille". Déjà que je rejetais cela quand on me parlait de ces foutue valeurs "chrétiennes (les valeurs , c'est à la bourse, p.....n!!! Le Christ n'est pas à vendre, il se donne, m....e!),
alors depuis que la Famille, chez les cathos français, devient une idéologie....
Une famille, c'est d'abord un endroit où l'on devrait trouver l'amour, la foi, l'espérance et, peut-être surtout - le pardon. C'est pour ça que le système libéral ne veut pas de familles.
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Écrit par : VF / | 28/12/2015

PAS D'ACCORD AVEC LE P. BONNET

> Le dernier billet du père Bonnet est sorti : http://www.yannikbonnet.com/Comment-gagner-sa-vie-en-servant-Dieu-sa-patrie-et-la-culture-Pere-Y-Bonnet_a329.html
Sur ce coup-là, je le trouve moyen. En faisant court, le conseil qu'il donne à ce "jeune professionnel", c'est : ne choisis pas ta carrière en fonction du sens que tu souhaites donner à ta vie (en particulier de foi !), mais trouve d'abord un bon job et le Seigneur te dira quoi faire... Avec en filigrane l'idée que le Seigneur le bénira en lui donnant la possibilité de se marier jeune et d'avoir beaucoup d'enfants...ce qui est très sympa pour ceux qui ont "galéré" pour fonder une famille (à la trentaine bien avancée voire à la quarantaine), sans que ce soit nécessairement de leur faute. Bref...
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Écrit par : Feld / | 28/12/2015

Cher Feld,

> Cette démarche "d'adoption" ne me semble ni théologiquement juste, ni humainement saine.
"Laissez les morts enterrer leurs morts": vouloir créer un lien post-mortem avec une âme, aussi attirante soit-elle par son côté petit ange-martyr, est à mon sens aussi dangereusement malsain que de chercher à parler avec les morts.
Cela nous amène à nous détacher de la vie d'ici-bas, qui est le lieu de notre vocation, tout en jetant sur les morts cette ombre terrifiante qui n'est pas chrétienne: "mort, où est ta victoire?", ombre qui ne les affecte plus, Dieu merci, mais qui obscurcit notre esprit d'un brouillard morbide.
Je veux bien louer avec elles, avec tous les saints du Ciel, les futurs saints du Purgatoire, et tous les pouilleux de la Terre, ça oui !!!
Mais plonger ma famille dans une familiarité avec le morbide, par charité mal-comprise: je ne l'ai que trop connu pour savoir ce que cela a de destructeur.
Notre mission sur terre est d'aimer et faire aimer la Vie, en y contemplant les multiples visages d'un Dieu-Amour qui sans cesse invente pour nous, pas de pleurer sur les ténèbres, déjà définitivement vaincues.
En parcourant le site que tu mentionnes, cher ami Feld, je retrouve cette fascination pour la mort qui habite tant de mystiques sensationnalistes qui ont bercé mon enfance, et qui ont trouvé un écho si séduisant, à l'adolescence, dans le romantisme.
Si l'on veut lutter vraiment contre toutes les atteintes à la vie, depuis l'avortement jusqu'à l'euthanasie, alors il nous faut d'abord chasser en nous toute complicité avec les esprits de mort, ces mille et une manières subtiles de tuer en nous la vie que Dieu nous donne.
Je décèle ainsi, habitant ce genre de site, les mêmes esprits de violence et de mort que dans le romantisme d'hier, et dans les clips jihadistes d'aujourd'hui: le vêtement est différent, mais c'est même façon séduisante de donner solution finale à un mal-être (ce vertige de l'adolescent devant l'insondable de toute destinée humaine, à la fois si absurdement fragile et si terriblement attachante, énigme existentielle que seul l'amour peut apprivoiser).
De violence et de mort? Si je vais jusqu'au bout de la logique de cette démarche, comment ne pas voir, de façon symbolique certes, mais les symboles sont aussi puissances de vie ou de mort, une manière de lever une armée d'âmes enfantines pour une Reconquista très peu catholique ? Derrière un langage doucereux, n'y a-t-il pas violence, rapt même, les familles "indignes" rééduquées par leurs propres enfants, qu'on a placé sans qu'elles le sachent dans des familles "très pieuses"?
Tout ce qui nous éloigne de notre prochain en chair et en os, là, celui qui nous met en inconfort parce qu'il n'est pas malléable et nous pousse dans nos limites de tolérance, pour nous faire revêtir le costume de héros sauvant des victimes que l'on peut à loisir redessiner au gré de nos fantasmes, ici des enfants muets perdus dans des limbes froides comme les Enfers, est à mon sens tentation démiurgique.
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Écrit par : Anne Josnin / | 29/12/2015

FAMILLE

> Bref, la fête de la Sainte Famille est l'opposée des unes du type "la Famille, chemin de sainteté", marronnier préféré des hebdos et mensuels cathos de toute "chapelle"...
Contente de voir que beaucoup s'inquiètent de l'idole de la famille dans l'Eglise (de France du moins). Il y a peu, on se faisait taper sur les doigts en l'évoquant...

Maud


[ PP à M. - La famille est simplement une partie de la condition humaine, et la condition humaine est un "chemin de sainteté" (l'homme est le chemin de l'Eglise")... ]

réponse au commentaire

Écrit par : Maud / | 31/12/2015

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